Des infos sur les patronymes du Haut Jura, leur signification, leur combinaison avec liste et date de première apparition dans les tables, le fait que tous les membres de la fratrie n'avaient pas systématiquement la même combinaison patronymique, etc ...

Préambule

Des infos sur les patronymes du Haut Jura, leur signification, leur combinaison avec liste et date de première apparition dans les tables, le fait que tous les membres de la fratrie n'avaient pas systématiquement la même combinaison patronymique, etc ...

Introduction

Les documents officiels à partir desquels les «généalogistes» construisent les arbres généalogiques sont les suivants:

L’Etat Civil républicain qui couvre de 1802 à «nos jours». C’est la période pour laquelle les recherches sont les plus «faciles» en principe. Toutefois la mobilité géographique des ancêtres peut s’avérer très problématique à reconstituer.

Cette difficulté concerne toutes les époques avec plus ou moins d’acuité. Sous l’Ancien Régime celle-ci était relativement importante (n’en déplaise aux «universitaires» qui ont traité le sujet en mode «jacobin»). Selon les échantillons effectués dans le cadre de la reconstitution des fratries en Franche Comté mais aussi en Berry, seuls 20% de la population paraît avoir été «sédentaire vrai» c’est-à-dire que pour un géniteur donné on trouve dans les BMS de la même paroisse, son baptême, son ou ses mariages, le baptême de ses enfants et enfin son acte de décès. Il s’agit d’une explication à défaut d’une justification de la Main Morte dans la Grande Judicature de saint-Claude pour fixer la population et éviter les tenures «sans maîtres» (ref Dom Benoit).

La période Révolutionnaire de 1792 à 1802. Souvent problématique avec le «calendrier républicain» qu’il faut convertir en «grégorien» pour avoir une continuité cohérente. Cette période présente de nombreuses lacunes pour les mariages (à reconstituer d’après les couples parentaux ou de la mère pour les enfants naturels) et les décès. Ceci est dû à une «administration balbutiante».

Les Registres Paroissiaux (RP) catholiques (pour le cas qui nous concerne relatif à la Terre de Saint-Claude «principauté ecclésiastique ou équivalent» ou encore «Haut Jura» correspondant à l’actuel arrondissement de Saint-Claude)

Les Mariages dans les RP sont en principe l’indicateur de référence comme fil rouge des filiations par patronyme. Dans les RP ils sont par ordre décroissant de précision

- les mariages filiatifs (quatre parents des époux renseignés)

- les mariages semi-filiatifs (que les pères des époux renseignés)

- les mariages non filiatifs (que les époux renseignés)

La précision décroissante est variable selon les paroisses. Prendre en compte la «limite basse» des BMS disponibles.

- table des couples établie à partir des parents renseignés dans les baptêmes (nécessite une reconstitution des fratries: non disponible en ligne, figure parmi les travaux en-cours du G2HJ)

 

Antérieurement à la limite basse des BMS (cette information figure dans le «Nouveau Guide du Généalogiste et du Biographe dans le Jura» édité par les AD du Jura en 1999) il convient de rechercher une traçabilité dans des documents annexes

Les recensements de 1654,1657,1659,1666 que l’on trouve dans «La population de La Franche Comté au lendemain de la Guerre de Trente Ans» en 4 tomes de l’Institut d’Etudes Comtoises et Jurassiennes

La montre d’armes de 1632 (Terre de saint-Claude) qui avec les recensements ou dénombrements de 1659 et 1666 figurent dans l’ouvrage de Bertrand Guyot «Les habitants de la Terre de saint-Claude au XVIIIe siècle» 2011

Les documents notariés qui traitent des échanges de propriétés dont un certain nombre a été retranscrit par Linda Reverchon (s’y reporter)

L’Histoire de l’Abbaye et de la Terre de saint-Claude» de Dom Benoit en 2 tomes dans sa réédition de 1999

 

Nota: les BMS disponibles présentent des lacunes car «toutes les naissances n’y figurent pas par un acte de Baptême». En effet lors de la reconstitution des fratries il apparaît des décès d’enfant dont on ne trouve pas le baptême correspondant alors que les parents sont «résidents» dans la paroisse pour diverses raisons:

Naissance lors des alpages d’été (les grangers) hors de la paroisse (en Suisse, en Savoie ou dans la Terre de saint-Claude l’enfant étant baptisé par un laïc sans trace dans le registre.

Cela peut conduire à des ruptures de filiation par le fil rouge des BMS

Le rapprochement entre les fratries présentent dans les recensements et les fratries issues des BMS ne se recoupent pas toutes.

 

Nota: A propos des BMS on évoque souvent le fameux «Edit de Villers Cotterêts» de 1539 qui ne fixa que l’obligation de la rédaction des actes du royaume en français. On en fait l’acte fondateur de la tenue des registres BMS. Cette ordonnance n’eut aucun effet en Franche Comté et dans la Terre de saint-Claude alors dans l’Empire. Elles ne furent annexées au royaume de France qu’en 1674. De même l’ordonnance de Saint-Germain d’avril 1667 relative cette fois à la tenue des registres des BMS (dite «code Louis»)

Pour la Franche Comté la tenue des registres paroissiaux fut réglementée par Claude de La Baume, prince-archevêque de Besançon en 1558. Cette réglementation fut plus ou moins appliquée en Comté de Bourgogne. (Histoire de la Population Française de Jacques Dupâquier PUF 1988 Tome 2 page 18

 

En revanche il semble que l’Abbé de saint-Claude avait pris des dispositions en ce sens pour ce qui concerne le territoire de son abbaye placé sous son autorité (l’Abbé de saint-Claude dépendait au séculier de l’Empereur et au spirituel du Pape à cette époque).

Le parlement de Dôle puis par un article des statuts épiscopaux de Besançon en 1591 il fut ordonné de tenir des doubles dont un exemplaire devait rejoindre les archives épiscopales. En réalité il ne fut souvent rédigé qu’un seul exemplaire dans la paroisse. On trouve trace dans les registres des audits de l’autorité administrative (le Grand Juge) et de la récupération du double en tête d’année de référence.

Cette situation pourrait expliquer les difficultés à trouver ou retrouver les registres BMS dans le Haut Jura et en Franche Comté (et la vulnérabilité de ceux-ci aux incendies).

 

 

Patronyme Paget dans le Haut Jura

Paget est un dérivé probable de «page» avec ici un sens de diminutif avec «et» de «petit page».

On trouve aussi

«Paiget» en 1659 à Morbieret à Cinquestral

«Pagey» en 1654 à Chamoille dans le baillage de Vesoul donné comme lorrain venant de Banel résident étranger.

«Pagez» en 1654 à Salins

«Pages» en 1654 à Eschenoz la Méline dans le baillage de Vesoul

 

«Paget» est également présent en d’autres baillages de Franche Comtéen 1654:

Chéssiria dans le baillage d’Orgelet (épouse Claude Groz)

Loulle dans la baillage de Poligny (deux couples Claude Paget plus un frère) absent en base G2HJ (BMS disponibles qu’à partir de 1737)

Chilly dans la baillage de Salins (François et Othenin originaires de Longchaumois):

Osselles dans le baillage de Quingey (épouse Denis Martin)

Bouhans dans le baillage de Gray (Claude né en 1610)

Fédry dans le baillage de Gray (François, tisserand)

Echenoz la Méline dans la prévôté de Vesoul avec Pages cité plus haut et Paget (François)

Mérey-Vieilley dans le baillage de Vesoul (Claude Paget échevin du lieu)

Devecey dans le baillage de Vesoul (Jean Paget)

Filain dans le baillage de Vesoul (Etienne Paget)

La souche de ce patronyme dans le Haut Jura est probablement Orcières, gros hameau de Longchaumois. On en trouve la trace dans des documents anciens qui précisent que les Paget auraient survécus à la Grande Peste de 1349. Paget aurait été présent à Longchaumois au XIV voire au XIIIe siècles.

Les Registres Paroissiaux (catholiques) disponibles permettent de constater une implantation relativement large à:

Saint-Claude 1604

Septmoncel 1607

Morbier 1609

Il y avait aussi une communauté (la communauté souche) à Longchaumois. Les BMS accessibles pour Longchaumois ne commencent qu’en 1668. Auparavant il faut utiliser «les sources annexes». De cette communauté était sans doute issu Jacques Paget «de Longchaumois) admis à la bourgeoisie de saint-Claude en 1613 (il fut nécessairement affranchi auparavant), Dom Benoit Tome II page 399.

C’est probablement le trop plein de la communauté de Longchaumois-Orcières qui s’installa comme colons aux Rousses. Paget apparaît dans les BMS dès 1616. Pour La Chaux des Crotonay en 1656 le même schéma a pu se reproduire

Paget comme bon nombre de Patronymes génériques «héréditaires» du Haut Jura a fait l’objet de «patronymes multiples», ici essentiellement des binômes, qui se concrétisent surtout lors de Baptêmes. Cet ajout ou cette précision intervenant à ce moment là (pour différencier des homonymes?)

Tous ces binômes n’ont pas la même densité dans les BMS disponibles et accessibles; Paget-Goy et Paget-Blanc présentent de nombreuses occurrences, les autres binômes sont plus anecdotiques. Attention toutefois cela ne signifie pas que ces binômes étaient marginaux dans l’environnement de l’époque. Ils pouvaient être présents sans générer d’actes dans les BMS (les décès sont sous enregistrés) ou encore être masqués dans les Paget «secs»

 

Paget-Goy apparaît dès 1618 aux Rousses.

Goy est un patronyme que l’on trouve dans les BMS de saint-Claude à partir de 1663 et présent également dans le baillage d’Orgelet plus à l’ouest

Paget-Goy recouvre le même périmètre que celui des Paget

Goy ou Goi a plusieurs racines: dérivé de Gai, peut caractériser un boiteux ou encore une serpe et celui qui l’utilise.

Paget-Dalphin (avec des variantes orthographiques comme Darphin ou Delphin) apparaît en 1632 également aux Rousses

Dalphin ou Delphin est un patronyme rare en solo dans les BMS de la Grande Judicature de Saint-Claude, on le trouve aussi combiné avec Reverchon

Comme pour Goy on le trouve également dans le baillage d’Orgelet

Ce patronyme à l’origine obscure pourrait .qualifier quelqu’un qui venait du Dauphiné (lors de la migration de familles dauphinoises qui refusèrent l’annexion Française en 1349).

Paget-Notaire cité à Morbier en 1659 . Ce cas isolé est en rapport avec le notaire de ce nom à Morbier (Anthoine Paget)

Paget-Chavin cité en 1661 à Longchaumois. Il s’agit probablement d’une inversion Chavin-Paget en relation avec le couple Claude Chavin et Pernette Reverchon qui vivait à cette époque aux Rousses. Ce «Paget-Chavin» s’inscrit dans la fratrie de ce couple.

Paget-Pernay apparaît en 1668 à Longchaumois. Pernay est également un patronyme présent à Longchaumois jusqu’à la Révolution (1776). Pernay, cette graphie parait typique de Longchaumois, est un dérivé probable de Perrin/Perron eux même dérivés de Pierre avec une connotation amicale. Perrin est un patronyme présent à saint-Claude dès 1599. Pernet se trouve dans le baillage de Vesoul plus au nord.

Paget-Pirolet apparaît en 1669 aux Rousses. Pirolet est un patronyme présent à Septmoncel au XVIe. Rare par la suite en solo, combiné avec Bondier en 1700 à Longchaumois. Piroley ou Pidodey se trouve également à Vesoul (baillage et prévôté)

Pirolet dérive peut-être de pirole «la petite fleur blanche» qui pousse dans les forêts de sapins.

Paget-Blanc apparaît en 1670 aux Rousses, dans les bases G2HJ, paroisse de son implantation principale (avec Bois d’Amont distraite des Rousses et Prémanon). En réalité les Paget-Blanc étaient présents dès 1630 en «mode masqué»

Blanc ou Blan est un patronyme présent à saint-Claude dès 1593 dans les BMS disponibles. Blanc est très fréquent dans le baillage d’Orgelet.

Blanc paraît qualifier un homme à la chevelure blanche.

Paget-Maréchal apparaît en 1678 à Longchaumois. Il y était probablement implanté bien avant cette date car Maréchal est un patronyme présent à Morbier dès 1579. Ce patronyme est très répandu en Franche Comté

Par ailleurs Maréchal ou son abréviation «Maâl» est associé et combiné avec d’autres patronymes (Bonnet, Cordet, Gallet,Groz, Pierret, etc en «patronyme générique») ou comme ici en patronyme composé.

Maréchal qualifiait le maréchal ferrand.

Paget-Poly apparaît aux Rousses lors d’un mariage d’une épouse de ce nom avec un Chavet Noir de Septmoncel en 1695. On trouve aussi «le Poly»(décès du père de l’épouse). Poli ou Poly est un patronyme présent dans le baillage d’Orgelet (combiné avec Lacrou) ainsi que dans celui de Poligny

Poly est peut être dérivé de Poulain.Poulain était un patronyme qui figure à saint-Claude dans la Montre d’Armes de 1632. Par ailleurs «Poulain» était le nom donné aux ouvriers chargé de transporter le sel dans les salines comtoises.

Paget-Pichoux apparaît seulement en 1698 à Longchaumois. Pichoux est un patronyme peu présent en solo, combiné avec d’autres patronymes. Pichoux évoque le Pie ou un homme avec une coiffure «blanche et noire».

Paget-Paille apparaît en 1699 aux Rousses. Probable patronyme des siècles précédents en extinction au XVIIe. On le trouve combiné avec Arbez aux Rousses. Paille est un patronyme rare dont la signification est soit lié au commerce de la paille, au possesseur d’un grenier à paille soit encore un sobriquet.

Paget-Motet apparaît en 1703 à Longchaumois. Mottet est un patronyme implanté à La Rixouse. Fréquent en combinaison comme avec Paget, ici, Citons Mottet-Jeannin à Septmoncel et Mottet-Buffard à Longchaumois.

Motet ou Mottet évoque quelqu’un qui habitait sur une hauteur ou un lieu sur élevé. Peu aussi signifier une origine de migration en provenance de Normandie (Morbier aurait eu un repeuplement normand après la Grande Peste de 1349

Paget-Anathole apparaît dans la Montre d’Armes de 1632 à Orcières, ne figure pas dans les BMS

Paget à Clerc apparaît dans la Montre d’Armes de 1632 à Orcières, ne figure pas dans les BMS

Paget-Mottet à Clerc apparaît dans la Montre d’Armes de 1632 à Orcières , ne figure pas dans les BMS

Paget-Pichot à Clerc apparaît dans la montre d’Armes de 1632, ne figure pas dans les BMS

Paget-Cusson est plus tardif en 1734 à Morez. Patronyme extérieur au haut Jura. Qualifie un maquignon avec une connotation péjorative

 

Michel Breton janvier 2018

 

Nota: il convient de prendre conscience que ces patronymes doubles n’apparaissent pas systématiquement pour tous les «titulaires». Ainsi «les premiers Paget-Blanc des Rousses» ne sont pas qualifiés comme tels.
Nota : La Franche Comté fut annexée à la France en 1674

En conséquence, le fameux édit de Villers Coetrêts de 1539 n'eut aucun effet en Franche Comté, alors Terre d'Empire.

Donc de 1539 à 1674 ... niet ainsi que l'ordonnance de Saint Germain en 1667 relative à la tenue des registres.

Pour la FC la tenue des registres fut réglementée par Claude de La baume, archvêque de Besançon en 1558.

Cette réglementation fut plus ou moins appliquée par les vicaire ou curés en charge

Le parlement de Dôle puis par un article des statuts épiscopaux de 1591 il fut ordonné de tenir des doubles dont un ex devait aller aux archives épiscopales.

En réalité il fut souvent rédigé qu'un seul ex jusqu'en 1736 ce qui explique ou peut expliquer les difficultés à trouver ou retrouver les BMS dans le haut Jura et en FC

sources : Histoire de la population Française de Jacques Dupâquier Tome II page 18 éd PUF 1988

Nota Insistons sur le fait qu'avant l'annexion de 1678, cette région n'était pas française et que les "concepts" français ne s'y appliquaient pas et qu'ensuite la transformation ne fut que progressive. Je pense aux surnoms que les officiels français ont attribués pour Morbier par exemple, or la plupart sont des patronymes contemporains ou des matronymes évacués (dans Bonnefoy à l'Anne, Anne est un surnom mais aussi un matronyme comme dans les Prost à la Denise (Gaillard).